Heureusement que tout le monde n'est pas tête en l'air...

Traversant le couloir de sa démarche lente et discrète, Shirayuki retint un bâillement. Ce faisant, l'adolescente serra son poing gauche et frotta son oeil, relevant ainsi légèrement ses imposantes lunettes aux épaisses bordures noires.
Une fois ceci fait, la blonde replaça les montures sur son nez. En soi, les avoir de travers n'était pas réellement un problème puisque la jeune femme était simplement censée s'en servir comme lunettes de repos et non tous les jours. Mais ça, personne ne le savait. Et elles étaient pratiques pour cacher son visage. De plus, avec la barrière de ses lunettes, Shirayuki se sentait comme un peu coupée du monde, protégée par la barrière de deux verres et une monture. C'était quelque peu ridicule... mais rassurant.

Clignant plusieurs fois des yeux pour se réveiller, la lycéenne leva, cette fois-ci, sa main vers ses longs cheveux blonds qui étaient attachés dans un chignon mal fait, libérant quelques mèches devant son visage.

Il était aisé de croire que Shirayuki prenait, en fait, peu de temps à se coiffer et s'habiller. En effet, il suffisait de voir son jeans totalement banal et sa tunique à longues manches trop grande recouverte d'une simple veste noire et son chignon tombant pour penser que la jeune femme n'était absolument pas superficielle (et avait bien peu de goût).
Ici se trouvait l'illusion ! En fait, la blonde passait beaucoup de temps et usait d'un soin infini pour se donner cette fausse nonchalance. Pourquoi ? Parce que, là, en la voyant, qui penserait qu'il s'agissait là d'un mannequin totalement en vogue aux très belles formes ? Personne, justement.

Mais bon, assez parlé de son apparence - même si elle y faisait attention. Là, Shirayuki ne faisait que marcher. Elle était partie en avance pour réviser un peu devant la salle avant son cours.

Il était un peu moins de huit heures quand Mercedes s’effondra dans son lit. Comme souvent, la jeune fille s’était réveillée très tôt afin de pouvoir préparer le matériel qui allait servir à différents professeurs de physique, de biologie ou autres matières scientifiques que l’orpheline, férue de connaissances, appréciait particulièrement.

Ayant quitté sa chambre plus de deux heures avant le début des cours, elle avait bien entendu pris garde à ne pas réveiller sa colocataire qui avait dû bien plus profiter de la nuit que son aînée. Shirayuki, puisque c’était le nom de la lycéenne de deuxième année avec qui Mercy partageait la petite pièce, était néanmoins déjà partie, sûrement pour se rendre en cours, et réviser un peu avant le début de ces derniers, laissant de la demoiselle aux cheveux roses retrouver la chambre vide une fois ses préparatifs terminés.

L’universitaire laissa échapper un soupir d’aise, songeant aux deux heures que l’absence de son professeur d’histoire lui offrait pour pouvoir se reposer. Après avoir retiré ses chaussures –un peu d’éducation tout de même-, elle s’allongea sur le côté et ferma les yeux… pour les rouvrir au bout de quelques secondes.

" C’est quoi ces bouquins ? "

Elle avait marmonné cela en se redressant. En effet il y avait posé en vrac sur le lit de sa camarade quelques livres qui avaient attirés l’œil de Mercedes. Ce n’était pas dans les habitudes de la lycéenne de laisser trainer ses affaires ainsi... En revanche il était bien plus fréquent qu’elle les oublie par étourderie. Malgré la fatigue, un léger sourire se forma sur les lèvres de l’américaine de naissance. Il n’y avait pas à dire, la lycéenne blonde pouvait parfois être une vraie tête de linotte, ce qui attendrissait souvent l’ainée des deux.

Après avoir jeté un regard à l’emploi du temps de Shirayuki pour s’assurer qu’elle n’allait pas s’embêter pour rien –ce qui n’était pas impossible-, l’universitaire renfila ses baskets et, après avoir attraper les manuels qui trainaient, dévala les escaliers quatre à quatre pour se rendre dans le couloir des lycéens de seconde année. Bien que la cloche annonçant le début des cours fût proche de sonner, les corridors étaient loin d’être bondés, les élèves préférant flâner dans la cour plutôt que de se précipiter en cours.

Mercy finit par apercevoir sa camarade à quelques pas de sa salle de classe. Elle l’interpella depuis l’autre bout du couloir avant de se précipiter vers elle avec un grand sourire malgré son essoufflement, lui tendant ses livres :

" Tu as oublié ça dans la chambre je crois !"

Toujours mal réveillée - elle avait particulièrement mal dormi -, Shirayuki, une fois devant sa salle, s'adossa au mur et commença à fouiller son sac en bandoulière à la recherche du livre de mathématiques - matière dans laquelle la lycéenne était très mauvaise.
Cherchant, la blonde fronça légèrement les sourcils : bah... il était où ?

Mais à peine eut-elle le temps de réfléchir à la question que quelqu'un l’interpella. Naturellement bloquée socialement, Shirayuki se crispa légèrement en tournant la tête vers le côté, découvrant ainsi l'identité de la personne qui l'appelait.
Très vite, la jeune femme se décrispa et un fin sourire étira ses lèvres quand elle vit sa "colocataire", Mercedes, courir vers elle. Mais... que faisait-elle dans le couloir des lycéens de première année ? Elle n'était pas censée commencer avant deux heures, elle...

Une fois l'américaine à sa hauteur, sa camarade de chambre lui renvoya un regard étonné, la laissant reprendre son souffle.
Ce fut quand elle lui tendit plusieurs livres que la lycéenne réalisa.

" Tu as oublié ça dans la chambre je crois !
- Mes livres !"

Malgré l'expression de surprise, la voix de la blonde était légère, très peu forte. Shirayuki ne parlait jamais fort, en fait...

Adressant un sourire désolé à son ainée, la lycéenne prit ses livres d'un geste très doux et reprit d'une petite voix.

"Merci. Je suis désolée que tu aies eu à te déplacer juste pour ça... mais tu me sauves la vie."

Comme ça, elle pourra réviser un peu.
Ah, elle avait de la chance d'avoir une gentille camarade de chambre.

Apparemment, Shirayuki ne s’attendait pas à voir sa camarade de chambre débouler devant sa salle de cours, ou tout au moins c’est ce que l’expression de son visage laissait présumer. Cependant, ce fut d’une toute petite voix qu’elle s’exclama. A dire vrai, cela n’étonna pas outre mesure Mercedes, qui s’était habituée à ce que la lycéenne ne s’exprime jamais très fort. Elle trouvait cela mignon, ça s’accordait à merveille avec son air de petite poupée fragile –bien que négligée, ne serait-ce qu’à en juger par sa coupe-. D’un geste aussi doux que sa voix, elle récupéra ses livres, remerciant son aînée tout en s’excusant. Celle-ci lui répondit avec un grand sourire qui se voulait rassurant :

"Je t’en prie, c’est rien ! Je m’en serais voulu que tu te sois fait punir pour oubli de matériel alors que je pouvais te les ramener sans problème ! "

Pour accompagner sa phrase, elle posa sa main sur l’épaule de Shirayuki en un geste qui se voulait protecteur. C’était tout Mercy, de vouloir surprotéger les gens qu’elle aime. Sans doute une conséquence inconsciente d’avoir trop perdu par le passé. Enfin là n’était pas le sujet. Esquissant un léger pas en arrière, elle s’excusa auprès de la blonde :

"Je pense que je vais te laisser maintenant… A moins que tu n’ais besoin d’aide pour réviser ?"

Après tout, maintenant qu’elle était levée, elle pouvait toujours en profiter pour donner un coup de main à sa camarade, ça ne lui coutait rien. Qu’est ce que c’est que deux heures de sommeil en plus dans une vie ? Elle pouvait bien s’en passer.

"Je t’en prie, c’est rien ! Je m’en serais voulu que tu te sois fait punir pour oubli de matériel alors que je pouvais te les ramener sans problème ! "

Le sourire de Mercedes était très agréable, il avait quelque chose de communicatif qui plaisait énormément à Shirayuki, qui y répondait naturellement. La blonde se sentait bien, quand on lui souriait ainsi, comme si, elle aussi, elle était importante.
Sensation qui ne fit que s’accroître alors que l'ancienne américaine avait posé sa main sur l'épaule frêle la mannequin. Shirayuki aimait beaucoup la présence protectrice de son aînée... mais ne voulait absolument pas se rouler dans la couverture confortable qu'était la situation : Mercedes ne serait pas toujours là pour la protéger. Dommage.

Esquissant un léger pas de recul, l'universitaire reprit la parole, tirant la blonde ses pensées :

"Je pense que je vais te laisser maintenant… A moins que tu n’ais besoin d’aide pour réviser ?
- Oh, oui, je veux bien !"

Réponse spontanée d'un cerveau muet à toute forme de science... ce qui frustrait énormément la lycéenne, qui voulait tellement bien faire. Ce matin, justement, elle savait qu'une interrogation l'attendait. Elle avait révisé, comme toujours. Mais son cerveau était hermétique dès qu'il s’agissait de calculs et autres formules. Peut-être faisait-il une allergie ?
Trêve de plaisanterie. Pinçant les lèvres, Shirayuki réalisa qu'elle pouvait peut-être, ainsi, profiter de la gentillesse d'une Mercedes qui avait certainement besoin de deux heures de repos.

"Enfin... si cela ne te dérange vraiment pas. Je ne voudrais pas empiéter sur ton temps libre... déjà que tu m'as ramené mes livres..."

La blonde retint un soupir. Son entourage allait vraiment se lasser de sa tendance à s'excuser d'exister...

La réponse de Shirayuki ne se fit pas attendre et n’étonna pas l’universitaire, qui savait que la blonde avait d’énormes problèmes avec les matières scientifiques, au contraire de son aînée. En même temps, on ne pouvait pas en vouloir à la lycéenne d’avoir des difficultés à faire la différence entre différents théorèmes ou ne pas retenir la forme du volume du cylindre que l’on utilise tous les tremblements de terre -on, au Japon ça voudrait dire assez souvent mais chut-, on leur bourrait tellement le crâne de formules qui était compréhensible que leur cerveau ne sature. Sans compter autres matières à côté : Histoire, géographie, japonais, anglais… Il y avait de quoi devenir fou.

Pourtant, la lycéenne faillit se raviser, ayant peur ne prendre sur le temps libre de Mercy qui, spontanément, secoua la tête en signe de dénégation.

"Allons ! Si je te le propose, c’est que ça ne me dérange pas ! "

Un sourire étira ses lèvres pour confirmer ses dires et de la main droite, elle ébouriffa légèrement les cheveux blonds de la jeune fille. Vraiment incorrigible cette petite Yuki ! Toujours à s’excuser pour tout et rien, cela amusait presque la demoiselle aux cheveux roses. Pour empêcher sa compagne de chambrée de s’excuser une nouvelle fois, Mercedes passa derrière elle et, montant légèrement sur la pointe des pieds –elle est légèrement plus petite je rappelle-, posa doucement son menton sur l’épaule de Shirayuki en demandant :

"Alors ? Par quoi veux-tu commencer ?"

Laissant échapper un petit rire amical, Mercy patienta pour la réponse de sa camarade, même si elle s’attendait légèrement un "Tout" est à réviser.

Secouant la tête, Mercedes répondit spontanément :

"Allons ! Si je te le propose, c’est que ça ne me dérange pas !"

Alors que Shirayuki ouvrit la bouche pour la remercier, l'ancienne américaine ébouriffa, de sa main droite, la touffe blonde de la lycéenne qui pouffa, amusée : avec ça, sa coupe de cheveux ne devait vraiment plus ressembler à rien... mais c'était rigolo.
Ce genre de geste amical plaisait beaucoup à la blonde qui n'osait jamais les lancer elle-même - fichus complexes !

Heureusement pour Shirayuki, la jeune femme aux cheveux roses semblait décider à les faire pour deux puisqu'elle passait derrière sa cadette et, se mettant sur la pointe des pieds, posa la tête sur l'épaule de la blonde qui sourit, trouvant le contact agréable.

"Alors ? Par quoi veux-tu commencer ?
- Hmm..."

Feintant la réflexion, Shirayuki répondit :

"Je sais additionner, multiplier, diviser. Donc, tout après ça."

Eh oui, quand elle était à l'aise, même Shirayuki Sawada faisait des blagues ! Incroyable mais vrai !
Ouvrant son livre de mathématiques entre ses mains, la lycéenne trouva le chapitre qu'ils allaient entamer en cours et le montra à son aînée.

"Si tu peux m'aider à comprendre cette étrange langue..."

Oui, les sciences étaient pour elle, une langue étrangère.

Faisant mine de réfléchir, Shirayuki essaya de récapituler ce qu’elle avait besoin de revoir. Mais le résumé de ses connaissances se limitant à l’addition et ses cousines multiplication et division, la quantité de notions à revoir était équivalente à l’ensemble du manuel de mathématiques qu’elle avait dans les mains, plus ceux des trois années précédentes. Bien sûr la réflexion de la blonde ne manqua pas de faire pouffer Mercedes qui ébouriffa de nouveau les mèches de la jeune fille avant de baisser les yeux sur le manuel qu’elle venait d’ouvrir.

"Oh des vecteurs ! Comme c’est mignon ces petites bestioles, mais un peu coriaces quand on ne sait pas comment les dresser !"

Petites saletés oui ! Ces maudits segments chapeautés de flèches avaient menés la vie dure à l’universitaire pendant des semaines avant qu’elle ne finisse par comprendre leur signification et leur fonctionnement par miracle, face à sa feuille d’examen –true story-. Alors autant dire qu’elle pouvait comprendre les difficultés de sa camarade à assimiler ces notions.

Réfléchissant à la meilleure manière d’aborder le sujet, elle repassa face à Yuki et, posant les poings sur les hanches en bombant légèrement le torse, essaya de glaner des informations :

"Bon. Pour le moment, vous avez vu quoi là dessus ? Ton prof t’a expliqué ce que c’était, ce que ça représentait ou les calculs et autres que l’on pouvait faire avec ?"

Des bonnes bases, c’est ce qu’il faudrait pour réussir à lui faire comprendre.

[J’ai pioché un truc au hasard dans le programme de seconde j’précise, c’est le plus proche de l’âge de Yuki ^^’]

De nouveau, Mercedes, après avoir pouffé, ébouriffa les cheveux de Shirayuki qui pouffa également : voulait-elle vraiment que sa coupe ne ressemble à rien ?
Pis l'universitaire répondit :

"Oh des vecteurs ! Comme c’est mignon ces petites bestioles, mais un peu coriaces quand on ne sait pas comment les dresser !"

La blonde grimaça : savoir comment les dresser.... chose qu'elle ne saurait peut-être jamais. Pourquoi était-ce si compliqué, les matières scientifiques ?
Mercedes repassa face à la lycéenne et posa les poings sur les hanches, bombant légèrement le torse. Remontant ses épaisses lunettes que la jeune femme aux cheveux roses avait un peu fait glisser en ébouriffant la tignasse blonde, Shirayuki fixait sa colocataire de dortoir, espérant que celle-ci lui apporterait la solution comme un miracle.

"Bon. Pour le moment, vous avez vu quoi là dessus ? Ton prof t’a expliqué ce que c’était, ce que ça représentait ou les calculs et autres que l’on pouvait faire avec ?
- Euh..."

Oui, ils avaient vu des choses... mais Shirayuki avait tout oublié, évidemment. Son maudit cerveau devait vraiment avoir un parasciences, en fait ! Une sorte de mini-parapluie sur lequel toutes les infos scientifiques glissaient avant de s'écrouler au sol, comme des gouttes de pluies ?
La blonde soupira en fouillant dans son sac : ah, ça, pour les belles métaphores et la littérature, il y avait du monde.

Finalement, la lycéenne sortit de son sac en bandoulière son cahier de mathématiques qu'elle ouvrit à la dernière page écrite.
Shirayuki avait une écriture comme sa personne : jolie, délicate... mais affreusement petite - et donc serrée. Même son écriture avait peur de déranger et s'excusait de rayer ainsi ce papier blanc de par son existence ?
Bon, il fallait arrêter avec les métaphores et faire des maths, là.

"Voilà mes dernières notes sur le sujet..."

Sa propre écriture lui semblait étrangère, comme une sorte de grec plein de symboles. Pourtant, c'était elle qui l'avait écrit, tout cela, non ?
Secouée d'un rire nerveux, Shirayuki s'excusa - ça faisait longtemps !

"Désolée, je suis une vraie catastrophe, en sciences... pourtant j'essaie !"

[HRP : Chaud, on a pas eu le même programme, en maths, en seconde ! Dire que moi, j'faisais des suites numériques x)]

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